Exposition 2004
Un photographe amateur célèbre la cité des temples

Le pouvoir de la photographie peut prendre des formes insoupçonnées. Savary Chhem-Kieth, un photographe amateur franco-khmer qui expose ce mois-ci au Grand Hôtel-Angkor de Siem Reap, en a fait l'expérience il y a quelques années. Rasmy, jeune khméro canadienne de 18 ans, était complexée depuis son plus jeune âge par la teinte très brune de sa peau. Ses parents ne firent rien pour arranger l'affaire, et se mirent en tête de la surnommer Srey Khmao, littéralement " fille noire ". Un jour, la jeune fille croise Savary, un photographe amateur, qui lui montre un cliché d'une Apsara dansant devant Angkor Wat. Jugeant que la photo était très réussie et que l'Apsara lui ressemblait, la jeune fille accroche le cliché aux murs de sa chambre. Les amis qui lui rendent visite, abusés sans doute par la grâce éternelle des femmes khmères, lui demandent s'il s'agit d'un portrait d'elle. Depuis, la jeune femme ne se sent plus de joie. Si l'éternelle harmonie des Apsaras d'Angkor rejaillit sur elle, c'est donc bien qu'elle est belle aussi. Par l'intermédiaire d'un vulgaire cliché amateur, Savary avait rendu à cette Khmère d'outre-mer l'éclat de ses origines. Loin de s'enfermer dans la célébration d'un sujet, la photographie avait révélé, en miroir, la beauté du spectateur.

Savary est un photographe amateur qui s'est formé sur le tas, à milles lieues de toute influence et de toute référence aux grands noms. Lors de ses fréquents allers et retours entre le Cambodge et le Canada, il se sert de ses images comme d'un pont reliant les khmers d'outre-mer à leur pays d'origine, " pour que les jeunes ayant grandi au Canada connaissent la vie quotidienne au Cambodge, notamment à travers les clichés de fêtes traditionnelles ". Samedi, aura lieu au Grand Hôtel à Siem Reap le vernissage de son exposition sur les temples d'Angkor. Une dizaine de photos amateurs vendues 500 dollars pièce.

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Fragile simplicité :

Toute la pureté de l'enfance, dans la naïveté de sa curiosité.Une force de la nature, à la fois invincible et vulnérable.

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Parti en 1974 en France pour y suivre des études d'agronomie tropicale au Havre, puis d'informatique, Savary s'entiche de la photographie. Il immortalise tout ce qui lui tombe sous l'objectif, clichés de familles, photos de classes ou de citoyens au travail. En 2001, il rassemble tout les clichés de son obscur travail et, encouragé par ses amis, se lance plus à fond dans son art. Aujourd'hui pleinement conscient de ses talents, cet éternel amateur s'efface néanmoins devant la magnificence des temples d'Angkor. " Pour photographier le Bayon, je me suis rapproché le plus possible du sol, comme si j'étais tombé en enfer, afin d'agrandir le temple par un effet de contre-plongée. C'est une marque de respect envers l'œuvre, explique-t-il avant de reconnaître : " La plupart du temps, la qualité des clichés ne tient pas à moi, mais au talent des bâtisseurs qui ont érigé ces temples ".

Ky Soklim, Cambodge-Soir du jeudi 5 août 2004, no2082

Exposition du 1er août au 31 août au Grand Hôtel-Angkor. Vernissage samedi 7 à partir de 18h.